L'histoire du jeûne, une pratique ancestrale

Le jeûne consiste à se priver de nourriture sur une période plus ou moins longue. Cette pratique se démocratise de plus en plus, alors que ses bienfaits sont connus depuis l’Antiquité. Quelles sont ses origines et comment l’histoire du jeûne lui a permis de traverser les siècles ?

Le jeûne, des origines religieuses et philosophiques

Les origines du jeûne remontent à plusieurs millénaires : de l’Antiquité au Moyen-âge, il a pris plusieurs formes, que ce soit dans le domaine de la religion ou de la spiritualité.

Le jeûne dans l’Antiquité

Le jeûne est une pratique ancestrale dont les origines remontent à l’Antiquité. Ainsi, il en est déjà fait mention dans le Mahâbhârata1, une épopée sanskrite, rédigée plusieurs siècles av. J.-C.. Les bienfaits du jeûne étaient donc bien identifiés, que ce soit pour des raisons médicales ou philosophiques.

Au Ve siècle av. J.-C., dans la Grèce antique, les vertus du jeûne étaient également reconnues et fréquemment mises en application. À l’époque, le jeûne faisait partie des rituels organisés lors des grandes fêtes religieuses. Pendant les Thesmophories par exemple, organisées dans la ville d’Éleusis en l’honneur de Déméter, déesse de l’agriculture, les Athéniens s’abstenaient de manger pendant une journée complète2.

À Rome, le jeûne pouvait également être associé à la religion. Cérès, l’équivalent latinisé de Déméter, était célébrée lors des Cerealia ou Jeux de Cérès. Pour l’occasion, les Romains observaient le Jejunium Cereris, une privation de nourriture associée aux célébrations3. Dans certains monastères crétois, les prêtres ne mangeaient rien de cuit durant toute leur vie. Cet engagement s’apparente à une autre forme de jeûne lié à des pratiques religieuses.

L’histoire du jeûne en Occident

Dans la religion chrétienne, le jeûne fait référence aux quarante jours et quarante nuits de privation de nourriture de Moïse à travers le désert. Dans la Bible, il est dit aussi que Jésus-Christ expérimente l’abstinence pendant quarante jours, juste après son baptême. Si le jeûne complet n’est que rarement pratiqué, les chrétiens observent ce qu’on appelle les « jours maigres » lors du carême. Cela consiste à se priver de viande jusqu’à la veille de Pâques, en opposition aux « jours gras »4.

Dans le judaïsme, le jeûne, aussi connu sous le nom de taanit, est pratiqué de façon très ponctuelle. Il est recommandé par la Torah pendant les jours de Yom Kippour, Tisha Beav, le jeûne d’Esther ou encore le jeûne des premiers-nés5. La plupart des jours d’abstinence de la religion juive font référence à des commémorations ou à des périodes de deuil.

La pratique du jeûne est également très présente dans l’Église orthodoxe. En effet, elle ne compte pas moins de quatre périodes de carême dans l’année ! Dans le protestantisme, la privation de nourriture est pratiquée de façon aléatoire, souvent individuelle.

L’histoire du jeûne au Moyen-Orient et en Asie du Sud-Est

Au sein de la communauté musulmane, le jeûne, aussi appelé saoum, est associé au ramadan et se pratique depuis la naissance de l’Islam. Il s’apparente aussi bien à une privation de nourriture et de boisson qu’à un renoncement spirituel. Il permet de développer sa conscience philosophique et de tisser un lien fort avec la religion.

Chez les hindouistes, le jeûne est très fortement lié à la dimension spirituelle de la religion. Il se pratique lors de certaines fêtes religieuses comme Chivaratri ou Karwa Chauth. Cependant, des écrits portant sur l’abstinence ont été retrouvés dans les Upanishad1, des textes à l’origine de l’hindouisme, datés entre 800 à 500 av. J.-C.

Chez les bouddhistes, on ne jeûne pas au sens propre du terme. En revanche, il est dit que le prince Siddhartha suivit pendant six ans un mode de vie très stricte, pendant lequel il mangea très peu. Cette pratique lui aurait permis d’atteindre l’illumination et de devenir Bouddha.


L’histoire du jeûne dans la médecine

Le jeûne comme soin thérapeutique est connu depuis de nombreux siècles. La privation de nourriture était alors une pratique fréquente, dont les bienfaits sur la santé étaient bien connus des guérisseurs.

Le jeûne, un remède très fréquent dans l’Antiquité

Dès 370 av. J.-C., le philosophe et médecin Hippocrate soutenait qu’il valait mieux soigner les petits maux par le jeûne plutôt que par la prescription de substances quelconques. Une technique très répandue dans la Grèce Antique, puisque Aristote raconte dans ses écrits que la privation de nourriture était un remède courant. En effet, lorsqu’une personne était atteinte d’un mal incurable, on lui conseillait de s’isoler et de prier dans l’abstinence.

Deux siècles apr. J.-C., à Rome, le médecin Claude Galien avance l’hypothèse qu’un jeûne prolongé permettrait de rétablir l’équilibre chez l’être humain. Il fait notamment le lien entre le corps et les humeurs, et le prescrit régulièrement à ses patients6. La pratique du jeûne et ses vertus thérapeutiques entrent alors dans les annales de la médecine.

La pratique du jeûne au Moyen-âge

Si la pratique du jeûne connaît un essor considérable au Moyen-âge, c’est en partie grâce à l’expansion de la religion chrétienne. Cependant, certains médecins continuent de voir dans la privation de nourriture le remède idéal à de nombreux maux. Au XIe siècle, le médecin Avicenne7, guérit bon nombre de ses malades en leur prescrivant trois semaines consécutives de jeûne. Quelques siècles plus tard, en Suisse, le médecin-chirurgien Paracelse étudie également les bienfaits de l’abstinence. Philosophe de la nature, il propose une théorie selon laquelle jeûner régulerait naturellement le corps humain.

Le jeûne à l’époque des temps modernes

C’est une époque qui marque un tournant dans de nombreux domaines : la science prend le pas sur la religion, ce qui offre de nombreuses opportunités pour la recherche médicale. Au XVIIIe siècle, Frédéric Hoffmann, médecin attitré du Roi de Prusse, affirme que « la modération et le jeûne» peuvent s’avérer être un remède efficace dans le cas de maladies graves. Aux États-Unis, en 1830, une petite fille atteinte du typhus est soignée par le médecin Isaac Jennings, grâce à une privation de nourriture associée à du repos.

À l’aube du XXe siècle, le médecin américain John Tilden promeut cette pratique dans les écoles de santé8. Enfin, dans les années 50, le jeûne est de plus en plus reconnu, notamment à travers le développement des médecines alternatives. En 1950, Herbert Shelton encourage une alimentation plus saine et une pratique régulière du jeûne9. En France, de plus en plus de médecins s’y intéressent : parmi eux, on retiendra surtout Paul Carton, puis André Passebecq ou encore Jean-Pierre Willem.

 

La pratique du jeûne de nos jours

Depuis quelques dizaines d’années, les médecines dites « alternatives » se développent de façon exponentielle. L’expérience d’un jeûne, souvent perçue comme telle, voit le nombre de ses pratiquants augmenter d’année en année.

En Russie, jeûner est devenu une pratique courante. Depuis plus d’une quarantaine d’années, il fait partie intégrante des soins conseillés dans le traitement de maladies complexes et invalidantes telles que l’asthme, les allergies, l’arthrose, ou encore le diabète.


En Europe, grâce au médecin Otto Büchinger, l’Allemagne fait figure de référence sur le sujet10. Après avoir réussi à soigner des douleurs articulaires grâce au jeûne, il ouvre une clinique dédiée à cette pratique en 1953. Pourtant, le jeûne reste encore peu connu en France, même si de plus en plus d’établissements de soins se spécialisent dans ce domaine. Il est souvent associé à de la marche, une approche de la privation de nourriture mise en avant par la Fédération française du Jeûne et Randonnée.


À l’échelle mondiale, de tels établissements sont encore rares, même si certains commencent à se faire connaître. On citera notamment :

  • l’institut Hippocrate aux États-Unis, connu pour le traitement de certains cancers ;
  • le centre de jeûne hygiéniste du biologiste Jean Rocan au Canada, qui a traité, à ce jour, plus de 8000 patients ;
  • le centre du docteur Yuumi Ishihara au Japon, qui fait de plus en plus d’adeptes. 

L’ histoire du jeûne a connu de nombreux bouleversements au cours des siècles. Qu’il soit utilisé à des fins spirituelles pour purifier l’âme, ou dans un objectif thérapeutique, pour nettoyer le corps, sa mise en pratique est sensiblement la même. Méthode d’autoguérison reconnue, mais trop souvent ignorée, il semblerait que son histoire soit loin d’être terminée.

Marie Distinguin


Références:
1 Sita Nath Pradhan (Chronology of Ancient India, Calcutta, 1927, p. 262)
2 FOUCARD, Paul. Les Mystères d’Éleusis, Paris, Éditions Pardès, 1992 (1re éd. 1914), 508 p., p. 317 et 320.
3 https://fr.wikipedia.org/wiki/Cerealia
4 Évangile selon Matthieu – Matt IV 2 – Lc IV 1-4
5 BRIET, Sylvie. Sciences et avenir. Disponible sur www.sciencesetavenir.fr/nutrition/d-ou-vient-la-tradition-du-jeune-dans-les-religions_29178
6 GALIEN, Claude. Méthode thérapeutique IX 10, cf. Boudon-Millot.
7 https://fr.wikipedia.org/wiki/Avicenne
8 TILDEN, John H., Food: Its Influence as a Factor in Disease and Health, 1914
9 SHELTON, Herbert. Article Hygiénisme (nutrition)
10 https://fr.wikipedia.org/wiki/Otto_Buchinger

Sources :

https://www.franceculture.fr/emissions/la-marche-des-sciences/le-jeune-lhistoire-dune-therapie-medicale-insoupconnee
https://fr.wikipedia.org/wiki/Je{6b8431f51f823649cd54eb755390e735fc3176bf1eefc111555cd714b1635801}C3{6b8431f51f823649cd54eb755390e735fc3176bf1eefc111555cd714b1635801}BBne

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